Les musiciens populaires (3e partie)

Les musiciens populaires (3e partie)
Nos musiciens populaires sont-ils les descendants des jongleurs
 
La musique populaire aurait pour origine la jonglerie. « La totalité de la production littéraire médiévale profane émane du couple troubadour-jongleur » prévient Luc Charles-Dominique dans son ouvrage Les ménétriers français sous l’Ancien Régime.
 
Le troubadour crée, invente des tropes. Le trope est un procédé mnémotechnique que les moines de l’abbaye de Jumièges ont mis au point vers 850 pour faciliter l’apprentissage des versets religieux, longs et compliqués.
 
Le jongleur est le joueur, l’amuseur. C’est donc lui qui met en vie, qui joue les œuvres du premier. Le jongleur peut être aussi le troubadour et vice versa.
 
Au Moyen Âge, l’oralité assure la promotion de l’écrit. Les textes ne sont pas lus, ils sont écoutés.
 
« Parallèlement à la littérature orthodoxe des chansons de geste et des vies de saints alors partout colportée, les jongleurs se mettent à composer des récits burlesques, des fabliaux dans lesquels la plupart des personnages de la société médiévale sont malmenés », précise Luc Charles-Dominique. Le succès de cet art porte les artistes partout. Ce mouvement est totalement incontrôlable par l’Église, pas plus que par le roi et les seigneurs. Tous redoutent les tirades de ces artistes pourtant appréciés pour leur comique.
 
Lorsqu’ils déclament quelques versets, s’il ne s’accompagnent pas eux-mêmes musicalement, ils peuvent s’entourer d’autres confrères jouant de la flûte, du fifre, de la cornemuse, de la viole, du chalumeau… et d’autres instruments dont les noms nous sont oubliés de nos jours : gigue, frestel, mandore… par exemple. À la cour, plusieurs de ces jongleurs, terme généralisant les artistes joueurs, peuvent assurer un véritable concert, jouant seuls ou accompagnant des trobes ou des danses.
 
À partir du XIIIe siècle, pour l’ensemble des professions, une vague de corporatisme se dessine. Les jongleurs, s’ils n’adoptent pas ce type d’organisation, ne manquent pas le regroupement confraternel. La production des jongleurs échappe à toute logique économique. Ils vivent de salaires résultant d’accords tacites, sans barème préétablis.
 
Résumons en avançant qu’ils vivaient plutôt d’aumônes. De plus, les éventuels salaires sont plutôt des paiements en nature, en vêtements mêmes. Cette situation les taxe de tous les maux, du chapardage à la grivèlerie. Le jongleur est dénoncé comme homme pervertis. C’est vrai qu’ils fréquentent les tavernes, ces hauts lieux du crime. La marginalité professionnelle des jongleurs devient extrême. Cette triste réputation se partage avec les prostituées et les usuriers. Beaucoup d’entre eux deviendront des vagabonds. Bien entendu, quelques exceptions viennent confirmer la règle.
 
Ce n’est donc pas dans cette catégorie d’artiste qu’il faut rechercher les origines des musiciens populaires porteurs de traditions musicales. Ce court aperçu de cette catégorie permet aussi de rappeler que l’utilisation d’instruments aujourd’hui considérés à part entière de la musique dite traditionnelle, sont déjà, au Moyen Âge, utilisés par les musiciens d’une autre esthétique qui n’est pas sans rapport avec les humoristes d’aujourd’hui.
 
À suivre…
 
Jean-Pierre Bertrand
Catégories : Un peu de l'histoire de la musique populaire en Vendée ;